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Interlude de littérature
27 mars 2024

Henri Gougaud : Paramour

Lecteur, mon semblable, mon frère,  la musique adoucit les moeurs ou nourrit l'âme, la purifie comme dit Aristote  mais pas n'importe quelle musique ...et il faut la pratiquer!  Certaines musiques peuvent vous assourdir. Lire , c'est boire et manger ;" l'esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas ", dit Hugo. Donc la musique nourrit l'âme et la lecture nourrit l'esprit.

Voilà un tantinet de nourriture pour l'esprit! 

Henri Gougaud né en 1936 à Villemoustaussou est un écrivain, poète , chanteur français et un conteur sans égal.

Résumé

Paramour est un fascinant roman qui nous transporte au Moyen Age, au temps des troubadours, des chevaliers et de la peste noire de 1348.  Le narrateur est un personnage du livre, un jeune de 17 ans , Mathieu qui rêve de devenir écrivain. Il habite à Avignon avec sa mère et sa soeur  Angèle , il est apprenti chez  maître Aventin, écrivain public. Un maître bon , patient mais , qui, détestant les pratiques de l'église, est accusé d'être hérétique.  Il dit que "le paradis n'est pas un lieu de l'univers mais un état d'âme. Nourrir l'âme, lui donner de la force, la hisser assez haut pour qu'elle soit à portée des anges, est un travail patient, minutieux, difficile".(   Il faut nourrir son âme, son esprit et son corps toute sa vie ! ) L'âme de Mathieu est prompte à s'élever, mais il est encore fragile!  

C'est alors que la peste arrive et  lui enlève sa mère. Son maître est  brûlé. Les gens sont pris de  folie ; ils accusent  les Juifs de conspiration contre les chrétiens et les massacrent. 

Alors Mathieu, sa soeur et son compagnon  Bernard s'en vont sur les chemins à la recherche de l'auteur d'un livre de contes, trouvé près d'un couvent. Le grand père de Bernard lui avait raconté beaucoup d'histoires. Il lui disait que "la nuit et le jour n'étaient que des sandales du temps, sur un chemin sans fin , qu'après l'une venait l'autre".

Bernard est devenu troubadour et c'est lui qui raconte des histoires aux autres. Quand Mathieu pleure  son maître disparu, Bernard lui dit:" Ne gaspille pas tes forces en jérémiades , ta vie véritable est longue, plus longue que ce laps de temps étroitement serré entre ta naissance et ta mort. Elle est faite d'intempéries, de soleil et de ténèbres, de découvertes et d'accomplissements". 

Ils marchent dans la lande et Mathieu la trouve  belle avec ses fleurs et ses cailloux , intimement  accordée aux musiques de son âme en paix. Mais il ne peut en jouir longtemps. Les malheurs( la mort de sa mère, de  son maître, les puanteurs de la peste)  qui l'avaient conduit en ces splendides lieux, l'assaillent , ils sont  encore ardents. 

Ils rencontrent Moktar, un homme fou, clairvoyant qui leur offre sa science de guérisseur (il guérit Angèle qui, blessée  en chemin, par un soudard , a de la fièvre) et ses mangeailles. Mathieu aurait aimé que Moktar lui confie ses peines, ses espoirs, ses secrets. Il lui aurait offert les siens.  "Mais qui peut pénétrer l'intimité des êtres? Et même de nous, que pouvons nous dire qui ne soit point trop éloigné de nos lumières profondes?"  Avant de se séparer de Moktar , Mathieu ouvre le livre , à sa demande,  et lit le conte suivant.

   On dit que le roi Salomon, se promenant tête basse , vit à sa sandale une fourmi et lui dit: "Où vas tu petite soeur?" Elle répondit: "Grand roi, ne me retarde pas. Je cours où mon âme m'appelle, à la poursuite des gazelles. -Amie, dit le roi, connais tu ces bêtes divines? - Hélas   non, mais j'ai vu leurs ombres passer et j'en fus tant bouleversée que je ne peux vivre sans elles." Le roi souriant lui dit: " Comment peux tu rêver en rejoindre quelqu'une? Elles vont droit comme l'oeil à travers le désert , elles franchissent d'un saut la dune que tu escalades en cent jours! A suivre leurs sabots , tu tomberas bientôt dans une empreinte creuse et la brise qui tout efface, peut-être t'enfouira dedans. Quitte tes illusions pauvre amie valeureuse et retourne à la fourmilière que tu n'aurais pas dû quitter. - Je sais,  ô roi des rois que la raison t'inspire. Mon pas est court, ma vie n'est qu'un jour de la tienne , mon ciel n'est pas plus haut qu'un brin d' herbe naissant. Je ne suis rien et j'aspire à la grâce parfaite, j'avoue que c'est grande folie. Mais qu'importe à mon coeur aimant. L'espoir me tient et me pousse, ne me laisse point en repos. Il occupe toute ma vie. Je veux lui obéir sans faute et la mort ne me sera rien si elle me prend sur mon chemin à la poursuite des gazelles. " 

L'auteur du livre est Frère Benoît Main d'Or du monastère de Saint Rome du Tarn. Après une semaine de voyage, pour éviter une bande de routiers, ils prennent le sentier vers la forêt des Cévennes où ils trouvent une maison en bois, habitée par un couple. L'homme, Vincent a été moine et ermite, avant de rejoindre une bande de pilleurs qui l'ont abandonné, blessé. C'est Sarah sa femme actuelle, qui lui a sauvé la vie, en le soignant et en priant avec ardeur.

Vincent instruit Mathieu et bientôt ce dernier se défait de ses fausses bontés. Il apprend à se défendre sans haine ni remords, par simple obéissance à son désir de vivre.  Il se sent dans une vie nouvelle où il n' a plus ses vieilles craintes ni ses timidités d'enfant. Sarah l'initie à l'amour, dans l'herbe. Avec Angèle et Bernard , Mathieu assiste à une messe nocturne mystérieuse avec des loups qui, comme dit Vincent" ont offert à chacun ce qu'il pouvait entendre et voir selon l'état de son âme".

Puis, le jour du départ arrive. Tout au long du voyage Bernard raconte ses histoires déraisonnables qui font la vie plus belle. Un soir ils arrivent au couvent de Saint Rome du Tarn. Benoît est dans son jardin. Il avait été autrefois peintre et sculpteur d'églises. Il leur avoue qu'il n'est pas l'auteur du  livre ;  il l'avait seulement copié et enluminé.

L'auteur de ce livre est Anselme de l'Aure, autrefois troubadour glorieux  à la cour du comte de Foix, , qui s'est ensuite retiré dans un ermitage proche d'Aubrac. De Saint Rome à Aubrac il faut compter deux longues semaines de route et il faut partir au plus vite, car l'automne est mûr. 

Ils s'en vont et bientôt, ils sont réduits à mendier le pain et la chaleur des étables. Ils marchent vides d'espoir. Dieu avait déserté ces espaces. Enfin, ils aperçoivent un hameau et arrivent à une maison forte et austère où  ils mangent et se reposent. A table Bernard, enfermé dans ses rancunes et ses peines, désespéré ,chante une complainte triste: " Seigneur si je suis votre enfant, vous êtes un mauvais père. Si je suis votre enfant, quel bien m'avez-vous fait? Aucun. Mon âme est vide." 

Le lendemain, ils quittent cette maison et la neige se met à tomber. Ils passent une nuit dans une bergerie et le matin ils repartent . Tout est couvert de neige. Pas un sentier! Pas un toit, une bête, un arbre. Rien! Vers où marcher? Pourquoi combattre? Pour la vie. Quand aucune pensée ne l'entrave, elle va sans autre but que d'être encore un jour, une heure de plus.

Alors Bernard se met à réciter Ave Maria: "Sainte Dame, Que chacun de nous vous parle selon son âme et son coeur. Moi sur cette fin de route où nous voilà parvenus, je ne peux rien d'autre que chanter pour l'amour de vous , pour Angèle et pour Mathieu, pour ce beau temps qu'il fait. " Sa voix est d'une beauté prodigieuse. 

Soudain un femme en haillons s'approche d'eux , s'empare du sac d'Angèle et s'enfuit, en ricanant. Ils montent la butte pour la suivre et de là- haut ,ils ont devant eux, dans le vallon  la domerie d'Aubrac. Miracle! La vieille était la Sainte Mère!  La prière les a sauvés. 

Lucie, une jeune fille du couvent les conduit à l'Ermitage d'Anselme de l'Aure.  Ils y arrivent. Sa demeure était modeste: un lit de paille, une table, un banc devant l'âtre, une petite écritoire, une bougie. Anselme comprend quel est le but de leur visite et avoue que les contes  ne sont pas de lui et qu'il ne connaît rien aux choses immortelles. Ces contes, il les a entendus en Terre sainte , d'un derviche mendiant qui les tenait d'un autre errant aveugle. 

Le pur et simple amour qu'Anselme avait mis pour écrire ces contes  a donné la force à Mathieu, Angèle et Bernard de venir jusqu' à lui.. Anselme les a écrits à la demande de sa bien-aimée malade de la peste et il y a  mis toutes les ressources de son art et tout l'amour de son être. 

Mathieu s' éprend de Lucie. Elle ne veut pas devenir nonne, mais son frère avait été gravement malade et son père avait promis à la Vierge de lui donner sa fille,  si le fils échappait à la mort . Il a survécu mais il est devenu une mauvaise personne. Mathieu écoute cette  histoire et pleure. Alors il décide de vivre dans la compagnie d'Anselme qui dit:" J'imagine un être dont l'amitié me serait si désirable que j'oublierais pour elle les misères du monde. Je voudrais aller à sa rencontre librement, lui offrir le meilleur de moi, travailler à lui faire un nid dans mon esprit et nourrir notre affection de ce silence que laisse derrière eux ces contes."  

Anselme dit que le Dieu que cherche Bernard est visible dans le regard et dans l'âme d'un homme qui habite dans le hameau Saint Jude à une heure d' Aubrac. Il est son maître. Arrivés à Saint Jude, il faut demander la maison de Marthe Paramour, sa mère.

 Anselme dit alors à Mathieu: " Si ton oeil constate, impassible, qui suis-je? Un corps vêtu, telle taille, tel poids, un vieillard. Donc si rien n'est dans ton regard, rien n'est dans ce qu'il voit, rien qu'une forme sans âme. Mais si plus que tes yeux, ton être ( coeur et sens ) me regarde, avec je ne sais quelle attention, alors quelque chose de plus qu'une épaisseur de chair est en moi perceptible. Ce quelque chose on l'appelle la vie et on peut l'appeler Dieu. Notre regard le crée ou le laisse en sommeil.   Allez visiter cet homme et si vous savez voir,  Dieu vous apparaîtra . Ce que vous cherchez n'est pas dans le savoir mais dans les créatures."

Ils rendent visite à cet homme : un être avec des jambes informes et fluettes qui ne peut pas parler. Mais dans ses yeux on voit une grandeur rieuse, une innocence d'aube, un bonheur de soleil et la pure amitié des êtres. La mère hausse les épaules comme  pour s'excuser d'être aux soins d'un idiot. Sur le chemin du retour, Mathieu sent son esprit lavé de tout nuage.

Le lendemain, Angèle et Bernard reprennent la route et Mathieu revient chez Anselme et commence a écrire le livre de son voyage. D'ici un an, Lucie doit prendre sa décision d'être nonne ou pas.

Bref, lecteur , l'histoire que raconte l'auteur prend la forme d'un chemin initiatique . Mathieu, le héros principal traverse les épidémies de peste, côtoie la violence des foules et des soudards, le froid et la faim mais rencontre aussi des personnages lumineux( Moktar, Benoît, Anselme, le fils de Marthe Paramour). Cette histoire aussi ancienne qu'elle soit, nous donne de la force pour traverser nos tempêtes à nous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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